Chronique Mai 2016
Deux termes qui paraissent antinomiques : d'un côté, le cœur, de l'autre, la tête, et pourtant…
Nous sommes entrés pleinement dans l'année jubilaire de la Miséricorde depuis l'ouverture des Portes Saintes de nos cathédrales et sanctuaires. Cet acte symbolique nous fait toucher du doigt ce qui est de l'ordre de l'impensable et que seul Dieu peut réaliser : transformer l'homme consentant en foyer de compassion et de pardon dans sa vie quotidienne. Ce processus de métamorphose en profondeur nécessite de sa part de la volonté mais aussi une grande part de confiance. Savoir que Dieu aime l'homme et peut le relever de ses misères est une chose ; se donner à Dieu dans une démarche concrète qui laisse des traces profondes dans son existence en est une autre.
Ainsi, par rapport à Dieu, en tant que croyant, la ligne médiane entre le savoir et la foi se dessine avec sa propre participation.
De même dans la vie courante : quand je possède un certain nombre de connaissances grâce à l'enregistrement efficace de ma mémoire, quand je peux parler de tel ou tel ouvrage ou de tel ou tel auteur plus ou moins connu dans tel ou tel domaine, je suis sur le versant du savoir. C'est important de faire travailler notre cerveau sous peine de l'anéantir à long terme. Mais pour que la ligne de crête soit tracée et que l'intellect ne devienne pas le dieu tout-puissant, il existe un autre versant qui crie sa nécessité : celui de savoir croire en la vie. Autrement dit, comment répondre à la question : Les choses que nous savons, les informations stockées dans les couches multiples de nos neurones, les pages de lecture emmagasinées, en quoi construisent-elles des ponts, tissent-elles des maillages, ouvrent-elles les frontières en nous et entre nous ?
Si nous nous trouvons un jour devant une personne qui possède peu de savoir intellectuel, le défi est là : ne pas étaler ce que nous savons mais recevoir de cet autre ce que la vie nous révèle.
Du coup, être miséricordieux intellectuellement revient à accueillir joyeusement les imperfections culturelles chez l'autre et chez moi, à donner à l'autre, différent de moi, cette place du maître car il est autre. C'est plutôt aller dans le sens d'une certaine sagesse comme le souligne Albert Bayet : "... à celui qui pense comme vous, dites : sois mon frère ; à celui qui pense autrement que vous, autrement que les autres, dites : sois deux fois mon frère. Souvenez-vous toujours que la vérité qui tue n'est pas vraiment la vérité."(1)
(1) Albert Bayet, Le suicide et la morale, Paris, Alcan, 1922, p. 803.
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Nous sommes entrés pleinement dans l'année jubilaire de la Miséricorde depuis l'ouverture des Portes Saintes de nos cathédrales et sanctuaires. Cet acte symbolique nous fait toucher du doigt ce qui est de l'ordre de l'impensable et que seul Dieu peut réaliser : transformer l'homme consentant en foyer de compassion et de pardon dans sa vie quotidienne.